Le défi: la French Divide 2020 en FATBIKE (ou le descriptif matériel)
La french Divide 2019 fut une très belle et première expérience en ultra. J'avoue ne pas avoir prévu d'y retourner mais sans doute que l'épisode COVID a changé la donne et m'a poussé à me réengager car la saison a été tronquée. J'ai eu la chance de boucler nos objectifs fatbike tandem (une course en Norvège et au Canada) avec mon ami Sébastien Le Meaux, ainsi que l'Atlas Mountain Race au Maroc en solo, le tout juste avant le confinement, mais la vie continue, et je ne concevait pas la suite de l'année 2020 sans objectif à court terme.
Me voilà donc avec des fourmis dans les jambes et le calendrier de la French Divide s'avère favorable. Mais se réaligner sur ce brevet, sur une seconde édition consécutive, doit, à mon avis, se faire différemment. Le succès de ma traversée, réalisée avec un Salsa Cutthroat, tout en gestion, m'incite à augmenter un peu le niveau de difficulté et je choisis le fatbike pour réaliser le défi 2020. Certes, l'édition 2019, même si je ne me suis pas imposé un rythme infernal, a été vraiment très difficile. Loin de moi l'idée de dire que je me suis promené, mais je suis prêt à tenter une traversée plus « roots », avec un vélo pas forcément dédié à ce type de brevet, et le défi, le challenge, se situe bien là.
Pratiquant le fatbike principalement sur des courses sur neige à l'international, je décide donc de « rentabiliser » un peu le vélo. Le fatbike reste un super moyen de voyager, souvent employé sur des expéditions aux trajectoires non tracées, il conserve de belles capacités et un capital sympathie énorme. Je peux en témoigner sur mes sorties type VTT, où parfois les randonneurs me regardent de travers lorsque je chevauche un VTT, mais sont plus souriants, plus curieux lorsqu'il croisent un « gros vélo ». J'ai donc préparé un Salsa Mukluk, vélo baroudeur de la gamme Salsa, capable de supporter du chargement et apte à une monte de pneus très larges. J'ai fait l'acquisition de ce vélo en remplacement du fatbike précédent, un rare Specialized S-Works de 9,1 kg prêt à rouler, qui gambade désormais sur les sentiers québécois. Le Salsa Mukluk, un peu plus lourd (10,4 kg avec pédales et repose-mains SQLab) a une capacité d'emport supérieure, plus typé « expé » et choisi dans l'optique de grandes courses, dont l'Iditarod Trail Invitational en Alaska.
Mais le fatbike présente quelques inconvénients. En premier lieu, la taille des pneus. Je monte des Schwalbe Jumbo Jim en 4.0, soit les pneus les plus légers de la catégorie. J'ai la chance d'avoir Schwalbe Tires en partenaire qui me fournit mes pneus fatbike, VTT et gravel, avec une gamme vraiment adaptée et efficace. Mais les pneus fatbike, de gros volume, sont bien sûr pénalisants sur un terrain et une distance du type French Divide.
Autre risque, en cas de destruction d'un pneu, il reste difficile de trouver un remplacement rapide dans un magasin de vélo, donc, sans doute, ma plus grande inquiétude.
Mais la possibilité de gérer la pression selon les terrains, le grip constant, le confort, la sécurité en virage, restent de bons atouts.
Second inconvénient du fat : le poids. Les pneus à nouveau, certes les Schwalbe Jumbo Jim légers sont les plus légers de la catégorie, mais restent tout de même lourds (1 kg pièce) par rapport à des pneus VTT et bien sûr, pénalisants par le poids. Ensuite, le vélo en lui même, les roues, restent plus lourdes que la moyenne des vélos affûtés.
Troisième inconvénient, le Q-Factor qui reste important sur un fat acceptant de très larges pneus. Le travail des membres inférieurs, alignement des genoux, axe bassin et membres inférieurs sont différents et peuvent engendrer des blessures à la longue. Cet élément et l'adaptation de mon corps à ce Q-Factor sera déterminant.
Mais comme j'adore le faire, ce fatbike est préparé aux petits oignons, spécifiquement pour la French Divide. Le Salsa Mukluk, vélo rustique est un tout rigide en carbone, comprenant beaucoup de possibilités de fixation. Je roule parfois avec un porte-bagage, pratique pour des virées packrafting ou encore pour le vélotaf ou quelques livraisons.
Le poste de pilotage a été modifié et emprunté à mon VTT avec un cintre et potence Enve (Mohawk's Cycles) et des grips + innnerbarends SQ-Lab.
La selle après de nombreux essais, a été confiée également à SQ-Lab, avec un modèle 612 ERGOWAVE Active, comprenant des élastomères facilitant le roulis de la plateforme, la forme en vague, soulage l'appui périnéal, et dont la finesse de l'ensemble semble me convenir. La largeur du croissant de selle (3 largeurs prédéfinies chez SQ-Lab) a été définie par l'intervalle entre mes ischions.
Les roues ont été changées. Les carbones Aeko, artisanales, très légères, sont changées au profit de roues Enve à la carte, avec l'indispensable moyeu Son dynamo sur la roue avant et un moyeu fat Industry 9 à l'arrière pour sa fiabilité, son incroyable et très court engagement, hyper réactif de 0.52° et sa beauté, tout simplement.
Le choix des cercles Enve (Mohawk's Cycles) n'est pas un hasard. Ces jantes double parois facilitent le montage de pneus. Pas besoin, comme les simples parois, d'insérer une chambre à air pour faire claquer le pneu avant de décliper un côté et ôter la chambre. De plus, à l'avenir, sur des compétitions longues distances sur neige (Fat Viking Race, Rovaniemi, Iditarod...) le profil en V permet une non ou bien moindre accumulation de neige dans la roue, donc un poids au roulage plus favorable. Pour les rayons, choix des incontournables Sapim CX-Ray.
Pour la liaison au moyeu Son, la partie recharge et charge continue du GPS est confié à k-Lite (withspirit.fr) tout comme l'éclairage. Testé cette année sur l'Atlas Mountain Race, ce système est juste génial, fiable et très efficace, donc incontournable.
La transmission: équipé normalement en SRAM XX1 Eagle, le fat se verra monté en XX1 Eagle AXS. En effet, suite à l'utilisation à VTT depuis 2 ans et avec une parfaite fiabilité, utilisé également sur l'Atlas Mountain Race, je fais à nouveau le choix de l'AXS pour sa facilité d'utilisation et son très très plaisant shifting, rapide et précis. La cassette 10-50 permet de passer partout avec un vélo chargé, combinée à un plateau acier 30 T et étoile Camo de Wolf Tooth Components (withspirit.fr).
Le pédalier est un Race Face Next G5 carbone, monté sur un jeu de pédalier à roulements céramique et les pédales sont des Crank Brothers Candy Eleven Custom Purple. Si j'adore les Egg Better, je préfère monter des Candy sur les longues distances, où je chausse des chaussures plus souples, permettant la marche, et avec lesquelles j'apprécie les plateformes des Candy.
La tige de selle est confiée à Enve, certes pas la plus légère mais solide, permettant de supporter sereinement la sacoche Lucy Rusjan Dyneema 11 L.
Le reste de la bagagerie est également réalisée sur-mesure par Lucy Rusjan, une artisane italienne talentueuse, avec laquelle j'ai pu réaliser des prototypes de matériels pour les courses arctiques.
Pour palier aux problèmes éventuels, l'accent est mis sur la trousse de réparation avec l'emport de 2 chambres à air type latex, légères et peu volumineuses. Le multi outils est un combo Encase System de Wolf Tooth (withspirit.fr), vraiment très léger et très bien conçu. Suite à des problèmes de fourmillements et perturbations nerveuses et les problèmes à utiliser un multi-tools, j'ai trouvé ce système vraiment pratique et surtout, complet, permettant aussi un accès plus facile à certain serrages. L'outil Master Link, de la même marque, sera également dans la trousse à outil, avec les maillons rapides de la chaîne 12 vi.
S'ajoutent 2 paires de plaquettes de freins, un adaptateur de gonflage compresseur, un démonte obus, 2 obus, valves Enve de rechange, 60 cl de latex, démonte-pneus, mèches dynaplug en renfort des mèches Wolf Tooth, rustines, duck tape, un « pin » de dérive chaine de rechange, fil de lin et aiguille.
A cela s'ajoute, dans la pochette de cadre (cockpit bag), un outil dynaplug Racer pour palier rapidement à une méchante crevaison.
Voilà, il ne reste plus qu'à rejoindre la ligne de départ en cette époque troublée, obscurcie par un méchant virus. Mais prendre le départ d'une telle épreuve, c'est vraiment s'offrir une fenêtre vers l'aventure, une bouffée d'oxygène, se déconnecter, se payer un morceau de vie vraie... Go !
Photo : Jean-Baptiste Delorme>
Endorphinmag Octobre 2020